31 mars 2006

Saul Bass

1920 – 1996 (USA)

Saul Bass est un des plus grands graphistes américains du 20e siècle. Son œuvre est impressionnante non seulement par sa qualité mais aussi par sa diversité : il a touché à tous les domaines du graphisme (identité visuelle de grandes compagnies, packaging, édition, logos, etc.) mais il a surtout révolutionné le générique de film ainsi que l’univers graphique qui l’accompagne (affiche, etc.).
Son style extrêmement graphique, inspiré par le Bauhaus et le constructivisme, composé de silhouettes tranchées, géométriques sur de grands aplats de couleurs vives s’est imposé très rapidement et a énormément influencé les graphistes actuels.


Il a commencé a travailler avec Otto Preminger, d’abord pour l’affiche et la générique de Carmen Jones (1954) puis pour le long métrage qui allait imposer le générique comme faisant partie intégrante du film, l’Homme au bras d’or (1955). A sa sortie, les projectionnistes reçurent une note leur indiquant qu’ils devaient ouvrir le rideau avant le générique … car jusqu’alors, ceci ne consistaient qu’en une longue liste de noms qui défilaient non pas sur l’écran mais sur les rideaux qui le masquait : ils ne s’ouvraient qu’au début du film !
C’est ce que Saul Bass décrivait comme le « pop-corn time » … il saisit alors l’opportunité de transformer ce temps d’attente : "Mon but au travers du générique est de préparer le spectateur à l'émotion du film, à lui ouvrir l'appétit, à le plonger dans l'ambiance de l'histoire, en abordant déjà, et de manière métaphorique, tous les thèmes présents dans le film. C'est une sorte de conditionnement, une expérience qui fait que lorsque le film commence, le public a déjà ressenti une résonance émotionnelle."



Par la suite, Bass travaillera continuera à travailler avec Preminger ainsi qu’avec Hitchcock, Kubrick (pour Spartacus), Scorsese (pour Les Affranchis et Casino). Il travaillera sur les œuvres majeures d’Hitchcock : Sueurs froides (Vertigo, 1958), dont il signe également la séquence de « rêve », La mort aux trousses (North by Northwest, 1959) et surtout Psychose (Psycho, 1960).


Pour le générique de ce dernier, il utilisera l’animation image par image d’une série de barres d’aluminium peintes en noir pour créer les effets de bande qui décrivent la psyché malade du personnage principal. Le texte est animé de la même façon en utilisant simplement photocopieuse et ciseaux …
Bass sera également à l’origine du montage de la séquence de la douche pour lequel il réalisera un story-board très précis et travaillera également sur les décors du film.


Bien que l’animation soit minoritaire dans l’œuvre de Saul Bass, il s’est approprié cette technique afin de créer des génériques à fort impact visuel et émotionnel. Il a popularisé l’idée d’un habillage animé « adulte » et presque expérimental, ouvrant ainsi la voie à des nombreux créateurs, notamment dans la publicité et à la télévision.


Où voir l'oeuvre de Saul Bass ? Sur le DVD Bass on Titles. Les génériques de La mort aux trousses et de psychose sont visibles ICI.
Liens : sa biographie, un entretien avec Bass, un site consacré à ses génériques et un autre qui recense également ses affiches de films.

26 mars 2006

Memories

Katsuhiro Otomo, 1995 (Japon) – 1h50 – Animation 2D/3D


Memories est un films à sketch comportant 3 court-métrages : Magnetic rose, adaptation d'un manga qu'Otomo dessina en 1980, Ses souvenirs (Kanojo no omoide) et qui donne son titre au triptyque, Stink bomb et Cannon fodder.
De grand noms ont travaillé sur ce projet comme Satoshi Kon à la direction artistique ou Koji Morimoto à la réalisation du premier film.


Magnetic rose – Rose magnétique
Koji Morimoto – 44 min


12 octobre 2092. Le Corona et son équipage d'éboueurs de l'espace capte un curieux SOS. Ils vont découvrir un étrange vaisseau, chargé des souvenirs de sa propriétaire ...



Magnetic rose est la création d'Otomo mais il porte vraiment l'empreinte de Satoshi Kon : la précision et l'importance des décors dans l'histoire, la grande qualité de l'animation (fluide et parfaitement rythmée), l'importance donnée à la psychologie des personnages annoncent déjà Perfect blue (1997).
Cette première partie se situe dans le futur mais curieusement ce sont les souvenirs, ces liens au passé, qui sont le centre même du film.



Stink bomb – La bombe puante
Tensai Okamura – 40 min


Nobuo Tanaka, un jeune chimiste, n'arrive pas à faire passer son rhume. Ingurgitant par erreur une molécule top-secret, il se retrouve transformé en arme bactériologique surpuissante ...



Stink bomb est sans doute le court métrage le plus ouvertement tourné vers la comédie et la dérision : l'administration et l'armée japonaise en prennent pour leur grade ! Curieusement c'est aussi l'oeuvre la plus proche d'Akira : on retrouve pratiquemet les mêmes personnages (notamment le général américain et son homologue japonais qui rappelle fortement les "enfants mutants"), le même design et le même rythme explosif. On retrouve également le thème de la destruction totale par la perte de contrôle des manipulations humaines sur la nature mais il est traité ici sous la forme de l'humour noir.



Cannon fodder – Chair à canon
Katsuhiro Otomo – 22 min


Dans une ville dont le seul but est de faire la guerre à un ennemi invisible, on suit la journée d'un petit garçon et de son père, chargeur d'obus au grand canon ...



Cannon fodder est le film le plus personnel des trois.D'abord par son graphisme : trait crayonné, couleurs posées par touches, teintes contratées (le rouge et le kaki dominent), imagerie empruntée à la propagande sont bien éloignées du design habituel de ce genre de production. Ensuite par sa contruction sous la forme d'un seul long plan séquence où les transitions sont gérées par de long mouvements de caméra. Cette fluidité de la narration fait ressortir la raideur des personnages, leurs tâches répétitives et l'absurdité de leur situation : toute une société tournée vers le canon, de l'éducation des enfants au travail des parents (fabrication des obus, entretien du canon, etc.).
Otomo tourne ici autour de l'idée d'un passé fantasmé, le souvenir de ce qui a été et de ce qui aurait pu être, un mélange féroce de fascisme et de stalinisme vu par les yeux d'un enfant.



Où les voir ? Memories existe en DVD.
Liens : un site français consacré à Otomo et à Koji Morimoto et l'article de Wikipedia consacré à Memories.

24 mars 2006

Psychanalyse des dessins animés

Geneviève Djenati, 2001 (réédition en 2004) - Pocket



Psychanalyse des dessins animés est un ouvrage très intéressant abordant la question de la perception et de l'impact des dessins animés sur le psychisme de l'enfant et sur son évolution. Cet ouvrage est destiné d'abord aux parents mais il devrait être dans la bibliothèque de tout animateur ...

Un petit regret cependant : le choix des exemples n'est pas toujours très judicieux et donne l'impression que l'auteur ne s'est pas bien renseignée sur certaines series ou films.
De plus, on sent bien que l'animation est surtout envisagée comme un media fait pour les enfants et pas un genre cinématographique à part entière ... Dommage, on aurait bien aimé avoir plus de détails sur l'impact psychologique chez l'adulte.

22 mars 2006

Cracking Contraptions

Chris Sadler & Loyd Price, 2002 (UK) – 10 films – animation en volume

Les Cracking Contraptions sont une série de 10 courts métrages reprenant les personnages de Wallace & Gromit. Chaque épisode décrit une des machines délirantes de Wallace et ses conséquences (souvent catastrophiques !) sur son environnement.


Au départ, les Cracking Contraptions étaient une série de photos autour des inventions de Wallace. Mais au cours de leur réalisation, Nick Park a souhaité en faire une série de petits films afin de leur donner vie. Voici des titres évocateurs :
- Soccamatic
- Snoozatron
- Swonmanotron
- Autochef
- Bullyproof vest
- Shopper 13
- Tellyscope
- Turbodinner
- 525 Crackovac
- Cardomatic


Aujourd’hui le Soccamatic, où comment Wallace invente le football sans peine …



Où les voir ? Dans les bonus du DVD Wallace & Gromit in Three Amazing Adventures (zone1).
Liens : le site officiel de Wallace & Gromit et du studio Aardman.

21 mars 2006

Animation de sable

L’animation de sable consiste à utiliser le sable comme matériau de dessin : l’animateur va créer une image en disposant le sable (ou la poudre) sur une table lumineuse. Les différentes épaisseurs laisseront plus ou moins passer la lumière, créant ainsi des variations dans l’image.


Cette technique permet deux modes d’utilisation. On peut l’utiliser afin de créer un film en stop motion (c’est-à-dire en capturant sous un banc-titre chaque image successivement puis en les mettant bout à bout). Certains réalisateurs l’utilisent également en « live » : ils sont filmés pendant la réalisation d’une succession d’image racontant généralement une histoire. On ne peut plus vraiment appeler cela de l’animation mais c’est un spectacle extrêmement intéressant pour comprendre cette technique et le travail du réalisateur.


Le réalisateur hongrois Ferenc Cako est sûrement la personnalité la plus connue dans ce domaine. Sa prestation au SICAF 2003 a d’ailleurs largement circulé sur le net depuis.



Peu de créateurs travaillent avec cette technique car elle implique de nombreuses contraintes (pas ou très peu de variations colorées, difficultés liées au matériau, temps de réalisation très long et pas de possibilité de voir son mouvement en cours de réalisation, etc.). Pourtant le résultat est vraiment intéressant, les nuances du sable se rapprochant d’un travail au fusain et sa plasticité permettant de générer des effets particuliers.


Où voir de l’animation de sable ? Sur le site de David Myriam, réalisateur français, et de Ferenc Cako, on peut voir à la fois des films et des performances. Sur le site de Ilana Yahav.
Liens : une interview de Cako (en anglais) et des extraits d’une série télévisée (Hongrie) sur la musique classique, illustrée par des animations de Cako.

20 mars 2006

Le bon numéro

Aurélie Charbonnier, 2005 (France) - 4' - Dessin animé

Un hilarant petit film sur la recherche de l'amour et l'usage du téléphone portable ! Le graphisme est délicieux, avec un petit côté "animation coréenne" ...


On doit cette jolie histoire à Aurélie Charbonnier qui sort tout droit de l'école de la Poudrière.


Où le voir ? En diffusion sur le site d'Arte (attention, il faut RealPlayer ...) ou toujours sur Arte dans l'emission Court-circuit de mercredi (22 mars à 00h15).

16 mars 2006

Sledgehammer (clip)

Je viens enfin de retrouver le génialissime clip de la chanson de Peter Gabriel, Sledgehammer (1986).
Encore une réalisation des studios Aardmann !

13 mars 2006

Carrefour de l'animation 2006

Samedi, j'ai été au Carrefour de l'Animation qui se tenait pour cette année à la Villette.
J'ai assisté, entre autres, à une très intéressante conférence sur l'animation et l'enseignement de celle-ci en France et au Japon. A cette occasion, on a pu découvrir les travaux de l'université Tâma de Tokyo (qui est plus une école type "beaux-arts" qu'une école d'animation proprement dite) : de vraies petites merveilles, très loin de l'image qu'on peut avoir en Occident de l'animation japonaise.

Quelques extraits : Seasons (intitulé précédement Mind the Gap) de Junpei Fujita, 2' 33 (2003)

et The evening travelling de Kondoh Akino, 3' 20 (2002).


Où les voir ? Seasons est ICI et The evening travelling LA.
Liens : le site du Carrefour de l'animation et le site de Kondoh Akino.

09 mars 2006

Ice city


Je viens de découvrir sur le site du studio Aardman (les papas de Wallace & Gromit) ce petit film expérimental de James Crulley autour d'un ville de glace ...
Une petite merveille de poésie !

08 mars 2006

Tokyo Godfathers

Satoshi Kon, 2003 (Japon) - 1h30 - Dessin animé 2D-3D

Tokyo Godfathers est un conte de Noël délirant et décalé : le soir de Noël, un trio de SDF trouve un bébé abandonné au milieu d'ordures. Au lieu d'amener l'enfant à la police, ils se mettent à la recherche de sa mère ...


Inspiré par le western de John Ford, Three Godfathers, Satoshi Kon brode ici une comédie loufoque autour de ses trois "parains" improvisés : un ex-père de famille joueur et lâche qui essaye de se racheter, un homosexuel qui rêve d'être une femme et dont le bébé exacerbe le désir de maternité et une jeune fugueuse. L'animation des personnages est tout simplement époustouflante : chacun dévellope sa personnalité, avec un jeu d'acteur impressionnant (parfois outrancier mais les mimiques de Hana ne sont pas sans rappeler le théâtre Kabuki ...).


Les décors sont comme toujours chez Kon d'un réalisme saisissant et d'une grande beauté. Tokyo est d'ailleurs le quatrième personnage de ce film : la ville offre plus qu'un décor, elle vient totalement structurer le récit puisque les personnages vont devoir errer pendant plusieurs jours dans ses rues et ses quartiers afin de retrouver la mère de la fillette.


On passe des situations les plus burlesques à des scenes beaucoup plus graves ou émouvantes pratiquement sans transition, mais avec une telle maîtrise de la mise en scène qu'on s'en apperçoit à peine.
Dans ce film, Satoshi Kon se tourne plus vers la comédie mais se pemet de faire intervenir des éléments de violence (comme la scène de passage à tabac des SDF) ou de fantastique (voir la scène finale) qui on été la base de ces films précédents, notamment l'excellent Perfect Blue. Il tratite ici de sujets plus "familiaux" mais les rapports humains et la façon dont ils dégénèrent parfois restent toujours son thème de prédilection.

Où le voir ? Tokyo Godfathers est disponible en DVD.
Liens : Le site du film, une petite bio de Satoshi Kon et un entretien sur les différences culturelles entre l'animation américaine et japonaise.

06 mars 2006

And the winner is ...

Le lauréat des Oscar 2006 dans la catégorie Film d'animation est ... Wallace & Gromit, le mystère du Lapin Garou !

02 mars 2006

Le mont chef (Atama yama - Mont Head)

Koji Yamamura, 2002 (Japon) - 10' - Dessin animé traditionnel et ordinateur 2D


Le Mont chef raconte l'histoire d'un homme tellement radin qu'il mange même les noyaux des cerises ("Pour ne pas gaspiller" dit-il). Un beau jour, il se réveille avec un cerisier qui lui pousse sur la tête … Il commence par couper cette petite tige puis finit par trouver que c'est une perte de temps, et laisse le cerisier s'épanouir. Au printemps suivant, tout le monde se précipite sur son crâne pour admirer l'arbre en fleur. Ne supportant plus d'être ainsi dérangé, il finit par arracher l'arbre … et à sa place reste un trou, qui se remplit d'eau de pluie. A nouveau envahi par les gens qui viennent se baigner dans cette petite mare, il s'enfuit et finit par trouver une solution radicale : se jeter dans le trou de sa propre tête pour en finir !


Atama yama est la transposition d'un récit traditionnel dans le japon moderne. Le réalisateur trouve ainsi un excellent support à son animation loufoque et à son graphisme délirant et poétique. Le commentaire souligné de shamisen (instrument traditionnel des geishas) ajoute encore à cette ambiance particulièrement décalée. Le rythme du film soutient vraiment la narration, jusqu'à la dernière séquence particulièrement "psychédélique" et à la fin tellement abrupte qu'elle en devient hilarante.

Une petite merveille à découvrir absolument !


Où le voir ? Sur le DVD du festival Anima et sur le DVD consacré aux films de Yamamura.
Lien : le site de Koji Yamamura
En + : Le Mont chef a eu le grand prix du festival d'Annecy en 2003 et a été nominé aux Oscar la même année dans la catégorie "Meilleur court métrage d'animation".